Pendant longtemps et jusqu’à ces derniers temps, le mot renoncer n’a jamais fait partie de mon vocabulaire. Je l’ai toujours enfoui au plus profond de mon être pour le cacher au cas où j’en aurais besoin ou au moins de le chercher assez longtemps pour que l’idée même de renoncer puisse dissiper avant même de retrouver l’envie.
Comme vous savez déjà, je pratique du MMA et du JJB, deux sports très physiques et psychologiques. On danse continue sur le fil aigu du rasoir de la peur et du dépassement de soi. Il y a quelques jours, en plein milieu du Sparring, j’ai reçu un body shot, un coup assez violent à la côte droite. Ce n’est pas comme si je n’avais pas l’habitude de prendre des coups. Cela fait pas partie du jeu.
Cependant, cette sensation de douleur était incomparable à ce que j’avais l’habitude de sentir avec les coups de genoux, les checks des kicks et des coups de poings à la tête. Je pouvais sentir l’impact et la puissance du coup se déchaîner dans mes intestins, je pouvais sentir mon rein palpiter. Ma côte a certainement subi une fêlure.
Ce qui est plus ironique c’est qu’il y a eu un moment de décalage de quelques secondes entre la frappe et la sensation de douleur atroce. C’est comme si le monde s’est mis en pause pendant 3 secondes pour me donner le temps d’évaluer ma tolérance à la douleur, de réfléchir et de prendre une décision. Et la décision était de baisser la garde et de renoncer. Et oui, j’ai renoncé.
Je continue toujours d’être fâchée jusqu’à maintenant avec moi-même. peut-être que je suis trop dur avec moi-même. Je n’ai jamais été mis au KO dans ma vie. Je touche le bois et je n’ai pas envie non plus que cela m’arrive. Néanmoins, j’ai déjà entendu Mike Tyson dire que la différence entre un KO & un body shot réside sur le fait que dans un KO c’est ton cerveau qui décide de s’éteindre comme mécanisme de survie et de protection alors qu’avec un body shot (un coup au corps plus particulièrement au ventre), le corps subit et le cerveau analyse. Votre conscience reste intacte.
C’est votre volonté de continuer et votre courage qui sont mis en jeu. Si vous abandonnez c’est parce que vous le décidez consciemment. Cela ne veut pas dire que vous n’êtes pas courageux. Cela veut dire tout simplement que vous avez atteint votre tolérance maximale de douleur.
Pourquoi je vous raconte tout ça. La vérité est que nous avons tous une limite maximale de tolérance face à la douleur. Nous avons tous un seuil. Il varie d’un individu à l’autre. Si vous pensez que vous n’auriez jamais dénoncé un juif pendant l’holocauste et au milieu du système Nazis pour sauver votre vie c’est parce que vous n’appréhendez pas suffisamment la nature humaine.
Si vous étiez torturés à longueur de journée dans les camps de concentration de Auschwitz, peut-être vous auriez fini aussi par vendre votre âme et bonté. Si toute votre famille était réduite en cendres par une bombe israélienne, vous seriez certainement conditionné par votre soif de vengeance et les médias occidentaux vous auriez considéré comme terroristes.
Pour être honnête, la vie vous testera et vous rencontrerez souvent des montagnes de difficultés qui semblent infranchissables. peut-être, vous allez renoncer ou pas. Qui sait, seul l’avenir nous le dira. Je suis en face d’une grande montagne en ce moment. Comme vous d’ailleurs. Parfois, j’ai juste envie de déclarer la défaite, de jeter ma serviette dans le ring de la vie et de sonner la cloche du désespoir.
D’ailleurs, je ne sais pas qu’est-ce qui me retient de le faire jusque là. Je ne sais pas ! J’ai quelques idées à partager avec vous et je vous recommande de faire le même exercice de questionnement si jamais l’idée de renoncer complètement dans la vie vous traverse l’esprit :
Peut-être, c’est parce que je porte un grand respect et d’estime pour la personne qui décide de porter le fardeau de la vie sans abandonner malgré les aléas comparé à la personne qui s’est laissé mener, malmener et qui finalement abandonne.
Qui suis-je si je décide de plier bagage quand les temps sont durs ? Que dirais je à la future et meilleure version de moi-même si je décide d’abandonner la course maintenant ?
Et pour être honnête, qu’est-ce que j’affronte pour de vrai ? Relativisons un peu. Je ne suis pas expatrié à la guerre. Je ne passe pas ma journée auprès des soldats amputés en trouble de stress post-traumatique. Je ne suis pas au milieu de Gaza avec le retentissement constant des bombes et des missiles. Je ne suis au milieu de la mer immense et vaste pour immigrer dans un pays qui ne me veut pas et qui n’a rien à cirer de mes rêves. Je ne suis ni un SDF ni une personne en situation de handicap.
Quand je dis traverser des moments difficiles en ce moment, au pire c’est des situations de rupture douloureuse, de finances serrées pour s’être engagé dans plusieurs projets simultanément, l’incertitude de l’avenir, la peur de l’échec, le rêve de vouloir briser les chaînes de la pauvreté une bonne fois pour toute au sein de ma famille surtout étant l’homme de la maison. Oui toutes ces situations peuvent être douloureuses et challengeantes. Cependant, ce n’est pas une question de vie ou de mort.
Si je réussis toutes ses tâches, j’en sortirai grandi et j’aurai une histoire à raconter. Et si je renonce, j’aurais souffert pour rien jusque-là. En plus, je ne sais pas si je pourrai me le pardonner si je n’essaye pas de tester mes limites et de sortir de ma zone de confort.
Sachant que des personnes avant moi ont connu des tests beaucoup plus endurants et dont le prix à payer était beaucoup plus cher et les conséquences beaucoup plus graves et malgré tout ont décidé de ne pas renoncer, Qui suis-je si je renonce ? Qu’en dis-je sur mon caractère ?
Peut-être je n’ai pas envie d’être la personne qui passe des années à creuser à la recherche de l’or et qui s’arrête juste avant la découverte, alors qu’il était à deux pas.
Un marathonnier sait exactement et à tout moment combien de Km il a parcouru et combien il lui reste. C’est qui lui permet d’ajuster sa vitesse et de garder son focus sur la ligne d’arrivée.
Quand on est au milieu des désespoirs et des déceptions, quand nous jugeons qu’il existe un grand écart entre notre situation actuelle et notre situation souhaitée, le temps semble durer une éternité. L’espoir agit comme une étincelle de lumière au milieu d’un long tunnel sombre obscur dont le bout semble lointain et inestimable.
Difficile de savoir où est-ce qu’on se retrouve dans la trajectoire ? Est-ce qu’on est proche ? Est-ce qu’on est loin ? Nul ne pourrait savoir. Il faudra s’accrocher et finir la traversée. C’est le seul moyen d’en être sûr.
Peut-être ma peur d’abandon surclasse ma peur d’être le lâche qui renonce en début de course ou d’être le con qui laisse tomber alors qu’il était si proche du but. Dans les deux cas, l’histoire n’aura rien à cirer de mon sort.
Donc je décide pour l’instant de ne pas déclencher la sonnette de capitulation et d’avancer pas à pas le plus loin possible.
Peut-être je préfère raconter les cicatrices de la vie et ses aléas que de raconter des histoires fantaisistes sur ce qu’elles pourraient être / auraient dû être.
Nous avons tous des amis et connaissances qui ne cessent de nous rappeler et de nous enivrer de leurs passés extraordinaires, à quel point ils étaient athlétiques, talentueux, élégants,…. Comment ils auraient pu devenir professionnels ou sortir avec telle célébrité, décrocher tel privilège, etc.
Ils passent plus de temps dans leurs imaginations et perceptions du passé plutôt que dans la réalité du moment présent. A l’instant présent, nous sommes tous confrontés à un choix. Il peut sembler anodin pour le moment mais il va certainement conditionner la qualité de notre vie et comment on se souviendra de nous. Il existe deux catégories de personnes : celles qui vivent l’histoire et celles qui la racontent.
je pense qu’il est noble d’aller en bataille et de revenir avec ses cicatrices pour raconter l’histoire vécue. Certains diront que toutes les personnes qui partent en bataille ne reviennent pas. Oui ! Néanmoins, elles auraient sacrifié leur vie dans le chemin de la gloire et on se souviendra d’elles de par leur courage.
En réalité, toute histoire peut être tragique, dramatique ou glorieuse. Comme tout film d’ailleurs, tout dépend du moment où tu décides de finir l’histoire. Si je vous racontais l’histoire du Président du Sénégal Bassirou Faye et que je décide de m’arrêter à la période où il fut condamné en tant que opposant politique, vous en verserez des larmes. Pourtant, il suffit de prolonger l’histoire un petit peu pour passer de drame à la gloire. En un espace d’un mois, il est passé d’une cellule de prison au palais présidentiel.
Vous trouverez des histoires similaires presque dans toutes les biographies des grands hommes. Si jamais vous pensez à mettre fin à votre histoire, choisissez le moment opportun.
Peut-être que c’est mon test et que la vie nous donne le même test jusqu’à ce qu’on passe l’épreuve.
L’expérience humaine est faite de douleur et de souffrance. Elles font partie intégrante de la vie. Impossible d’en passer. Nous sommes constamment testés et nous avons toujours des défis à relever. Cela étant dit, le test vient de différentes façons et manières. Il peut être sous forme de maladie incurable, de chômage prolongé et sans revenus, de surpoids et diabétique, de célibat et de solitude profonde malgré vos nombreux efforts, etc. L’un n’est pas plus important que l’autre. Un test reste quand même un test.
Ne jamais sous-estimer ou comparer la douleur ou la souffrance de qui que ce soit. Peu importe à quel point vous pensez être bas dans le gouffre du désespoir, on peut toujours tomber plus bas. La profondeur du trou du malheur n’a pas de limite.
Comme je disais au début, notre seuil de tolérance à la douleur est variable et nos susceptibilités sont relatives. Je connais des gens qui se battent avec leur obésité pendant une décennie et qui pensent à mettre fin à leur vie de temps en temps parce qu’ils n’aiment pas la personne qu’ils voient dans le miroir. A chaque fois qu’ils se lancent dans des programmes de fitness et de perte de poids, ils finissent par rechuter. leurs corps est leur test ultime. Certes, c’est pertinent de relativiser. Cependant, personne ne peut raisonner sa douleur.
Je connais un couple marié depuis plus de 10 ans et qui a du mal à se faire un enfant. C’est leur test ultime. D’autres sont déprimés et découragés de la vie et ont du mal à quitter leur lit. C’est leur test ultime du moment. D’autres sont amoureux mais, pour des raisons ethniques et traditionnels, leurs parents refusent de leur donner au mariage. C’est leur test.
Quelqu’un riche se retrouve en ce moment même à l’hôpital et prêt à échanger toute sa richesse pour retrouver sa santé alors que quelque part quelqu’un de pauvre et en bonne santé est prêt à tout sacrifier pour devenir riche.
Quel que soit le cas, le test est garanti. Et ce n’est pas pertinent de le justifier ou pas. De toute façon, vous le vivez. Et la réalité est difficile à falsifier.
Alors, si Dieu a mis sur votre chemin un test, peut-être c’est parce qu’il sait que vous êtes en mesure de le surmonter. Il suffit juste de se faire confiance et de s’accrocher. Peut-être aussi, il va continuer de nous donner le même test jusqu’à ce qu’on passe l’épreuve. Comme disait Richard P. Feynman “ Le premier principe est que vous ne devez pas vous tromper et que vous êtes la personne la plus facile à tromper.”
Peut-être que nous ne sommes pas complètement honnêtes avec nous-mêmes et nos intentions et que le test est plutôt un test contre soi-même. Peut-être, si nous avions bien purgé nos cœurs de toutes les mauvaises intentions, ordonner nos couloirs et tiroirs, nous apprendrions à voir plus clairs ou à voir avec de nouveaux yeux.
Je ne connais pas la réponse à toutes ses questions. vous êtes la seule à pouvoir y répondre.
De tout mon cœur, je vous souhaite le meilleur. j’espère que nous réussirons tous à passer l’épreuve ultime de la vie avec la tête haute.
Prenez soin de vous !