Et si l’Afrique arrêtait de prendre la révolution digitale pour consommation digitale !

La révolution technologique et digitale continue de connaître un essor fulgurant avec l’émergence de nouveaux concepts comme Augmented Realities (AR) ou Artificial Intelligence (AI) et de nouvelles machines de plus en plus sophistiquées qui vont changer radicalement notre manière de voir le monde.

Cette révolution rapide et exponentielle est entrain de rompre toutes les pratiques traditionnelles que l’humanité prenait pour des principes de base au point même de susciter le débat sur l’avenir du travail et la relation homme – machine.

Dans un monde où tous les objets sont connectés, l’humain se retrouve de plus en plus en arrière-plan avec la technologie à son service. Le dernier rapport des Nations-Unies sur l’évolution technologique explique que 47% des emplois risquent d’être remplacés par les machines d’ici 2025.

Je n’ai pas peur des ordinateurs. J’ai peur qu’ils viennent à nous manquer. »

Isaac Asimov

Depuis la nuit du temps, l’humain n’a jamais été aussi dépendant. Il suffit de cliquer sur un bouton pour commander une pizza chaude et être livrée en moins de 15 minutes. Des transferts de poches de sang d’une zone à une autre se font en espace de quelques minutes grâce à des drones intelligents et sophistiqués commandés à distance pour sauver de nombreuses vies tous les jours.

Maintenant, on reconstruit des cellules organiques par impression 3D ; plus besoin de greffe. Les machines sont dotées d’une capacité neuronale et émotionnelle au point qu’elles peuvent servir d’assistante virtuelle ; aussi intelligentes que les humains. 

Encore plus surprenant, On est passé de Machine Learning au Learning Machine. Oui, une machine peut enseigner et transférer toutes ses connaissances intellectuelles, informationnelles et analytiques à une autre machine dans un délai très réduit et à une vitesse aussi rapide qu’une voiture de sport.

C’est comme si on faisait une extraction de toutes vos connaissances, informations, expériences et aptitudes emmagasinés dans votre cerveau et qu’on les transfère dans un autre cerveau vide qui sera votre copie conforme. Mieux, cette copie conforme pourra être améliorée en version 2.03.0, …… ; chacune avec des paramètres et capacités beaucoup plus avancés.

Avec le programme AlphaGO de Google, Ils ont inventé une machine dans laquelle on a uploadé une série de documents, de vidéos et d’autres supports relatifs au jeu de GO (qui est une sorte de jeu de Chess).

Grâce à l’algorithme développé et l’apprentissage automatique intégré, l’ordinateur peut synthétiser le flux d’information qu’on lui fournit constamment pour prendre des décisions analytiques et devenir potentiellement un joueur de GO intelligent.

Ensuite, ils ont réunis les masters du jeu de GO pour qu’ils jouent avec l’ordinateur AlphaGO. Devinez ce qui s’est passé ? Vous l’avez sûrement deviné !

L’ordinateur a battu tous les masters y compris le champion du monde KE JIE qui annonça, juste après, sa retraite.

Et ce n’est pas tout, en décembre 2017, la version raffinée AlphaZero surpasse largement, toujours par auto-apprentissage, le niveau de tous les joueurs humains et logiciels, non seulement au jeu de go, mais aussi aux échec et au shogi.

Imaginez ce qui se passerait avec de nouvelles versions plus raffinées !!!

Le monde est en changement exponentiel et l’avenir n’a jamais été si radieux. Du jamais vu.

La technologie est et continuera d’être un outil très important de facilitation, d’optimisation et de révolution dans toutes les dimensions de la vie sur terre.

 Est-ce que ce changement serait positif ou négatif, ça dépendra de ceux qui créent, leurs intentions et les potentielles débouchées de leur invention.

Je crains le jour où la technologie dépassera les capacités humaines, le monde risque alors de voir une génération de parfaits imbéciles.

Albert Einstein

Mais la question n’est pas là. Parlons de notre continent. Qu’est-ce-que l’Afrique y gagne-t-elle ? Les Africains vont-ils continuer d’être de simples consommateurs ? Surtout qu’ils ne représentent que 2% des auteurs d’inventions technologiques et numériques.

Pendant que les pays occidentaux commencent, à la fois, à récolter les fruits de leurs propres inventions et à faire face au débat du grand remplacement où les humains ont peurs, plus que jamais, d’être remplacé par des machines avec toutes les conséquences économiques et sociales qu’engendraient ce phénomène, parlons de notre propre révolution technologique ici en Afrique, particulièrement au Sénégal.

Presque 30 ans après l’arrivée de l’internet, l’Afrique, comme d’accoutumé, est largement en retard. Pourquoi n’arrive-t-elle pas à tirer grand profit de ce marché ? Pourquoi notre taux de consommation est trop élevé malgré notre prétendue pauvreté contrairement à notre taux de production qui est trop faible ? Comment ça se fait que plus de 90% des startups qui naissent autour du numérique finissent par mettre les clefs sous la paillasse après trois années d’existence.

C’est vrai que l’internet a réglé un problème crucial dans notre continent qui est la communication en particulier et l’accès à l’information de manière générale. Est-ce une raison de s’arrêter là et de croire que parler sur WhatsApp, suivre ce qui passe ailleurs et ici sur les réseaux sociaux régleraient nos problèmes ; nos vrais problèmes.

En outre, étant des africains, notre propension au consumérisme, notre paresse intellectuelle et notre amour de gloire rapide nous poussent souvent à sauter les phases de conception, de développement et d’exploration pour aller directement copier ce qui se passe ailleurs et l’appliquer aveuglement dans notre contexte.

C’est l’innovation qui différentie les leaders et les suiveurs.

Steve Jobs

Ce n’est pas parce que le système de vente traditionnel en gros et en détail connait un déclin fulgurant avec l’émergence des e-commerces (Amazon, Alibaba, Aliexpress, ebay, …..) dans les pays développés que nous devons, nous les africains, copier le même modèle in situ.

Si Apple ou Tesla entre autres peuvent se permettre de fermer leurs boutiques (stores) parce que la majeure partie de leurs commandes viennent de leur site dans un pays où les taux de bancarisation et de connectivité avoisinent les 100%, est-ce que le Sénégalais préféreraient-ils acheter un objet qu’ils n’ont pas encore touché ? Préféreraient-ils acheter sans marchander ? Ont-ils suffisamment confiance à un interlocuteur semi-virtuel ?

Les réponses à ses questions démontrent carrément que le commerce traditionnel est loin d’être en danger en Afrique (d’ailleurs c’est la principale source du secteur informel qui englobe plus de 80% des emplois au Sénégal). Le e-commerce ne pourra pas le remplacer, en tout cas, pas cette décennie et pour d’autres raisons aussi évidentes que celles qui viennent d’être énumérées.

Pareil avec les systèmes d’opération IOS, Android, Microsoft ou Mac que nous utilisons. Ils sont importants et ils nous simplifient la vie ; sans aucun doute. C’est un ensemble de plateformes qui permet à toutes les parties prenantes (développeurs, utilisateurs, particuliers et entreprises) d’y retrouver leurs besoins et des solutions à de potentiels problèmes.

 Non seulement ils ont démocratisé le développement des applications avec ITunes Store ou Google Store qui permet à chaque développeur d’être à la fois créateur et vendeur, ils ont rendu possibles d’interconnecter tout de manière intelligente, personnalisable et efficiente (internet of things).

Mais avec tous ses avantages, soyons honnêtes. Ils n’étaient pas du tout destinés à nous ou ne prennent pas du tout en compte nos réalités.

Voici un exemple terre à terre pour vous donner une idée.

Les appareils photographiques étaient créés, dans son origine, pour les élites avant d’être démocratisés. Cela n’empêche pas que si nous utilisons les mêmes appareils créés par un groupe de personnes élites de couleur branche qui n’ont pas pris en comptes tous les facteurs différentiels au moment de la création pour faire des reconnaissances faciales, il y a une probabilité d’erreur de plus de 40% concernant les personnes de teint noir.

En d’autres termes, le censeur inclus dans votre smartphone ou autre objet d’enregistrement par pixel n’absorbe pas si bien les rayons issus d’une pigmentation noire (mélanine).

Et ce n’est pas moi qui le dis. C’est prouvé scientifiquement. Si vous êtes toujours sceptiques, je vous conseille de regarder le témoignage d’un ancien employé d’Uber du programme de construction de Self-Drive Cars (voiture sans chauffeur) et qui disait que, à chaque fois qu’on a testé le censeur de reconnaissance faciale de deux voitures auto-conductrices dans une intersection auto-stop, l’une conduite par un blanc et l’autre par un noir, la priorité est donnée au blanc indépendamment du code de la route et quel que soit la situation. Incroyable !!!!

Même au-delà de l’aspect technique, vous avez le droit d’utiliser ces outils aussi longtemps que vous ne dérangez pas trop. Nous voyons maintenant de nouveaux hommes politiques qui sont censurés par les GEANTS des réseaux sociaux pour des raisons purement liées à leur position ou avis pour servir les intérêts d’un certain lobby ou d’un groupe d’élitistes.

De même que Google qui révoquent l’accès sur sa plateforme aux certaines entreprises de grande potentialité qui refusent d’être acquisitionnées et qui risquent de devenir de sérieux concurrents.

Ou Youtube qui bloque les contenus des révolutionnaires propulseurs d’idées qui rassemblent et qui sont susceptibles de causer des soulèvements populaires pour des objectifs communs.

La meilleure manière que je trouve pour expliquer notre consumérisme africain et notre dépendance aux outils et technologies c’est d’imaginer être le citoyen d’un pays pseudo-démocratique dont la constitution a été créée par un groupe de personnes élites, peu diversifiées et qui ne prennent pas en compte toutes les dimensions sociales, économiques et politiques du pays en question.

Ensuite, imaginez que nous demandions à l’ensemble des créateurs souhaitant proposer des solutions à des problèmes réels que rencontrent les citoyens de s’assurer que leurs propositions soient conformes avec la constitution qui est, d’ailleurs, contrôlée par un groupe de personnes puissant qui servent plus leurs intérêts que ceux des citoyens.

Maintenant, considérez les citoyens comme les consommateurs et utilisateurs (que nous sommes) d’un ensemble de produits et de solutions créées par des créateurs qui sont les développeurs d’application qui se basent sur un système d’opération qui est la constitution.

Combien de temps prendra-t-il pour que le citoyen lambda sente les limites et la sélectivité de la constitution et de ceux qui l’ont créée ?

Ou combien de temps faudra-t-il avant que le développeur se rende compte que, quel que soit son ingéniosité, il est obligé de se conformer selon les principes et règles de la constitution (créateurs du système d’opération) ?

Après tout, il n’est qu’un locataire et non un propriétaire. Il a le droit de réclamer son droit légitime. Mais, il est loin d’être le seul locataire au monde et on peut lui couper son accès à n’importe quel moment.

Nous aurons le destin que nous aurons mérité »

Einstein

Justement, l’Afrique est un berceau de consommateurs mal informés qui achètent et consomment plus pour être à l’affût des tendances qu’autre chose et d’un nombre limité de développeurs (locataires) dont les parties techniques (stockage, traitement, analyses) sont logés ailleurs dans une autre constitution loin d’être la nôtre.

Je suis loin de porter une voix cynique pour toutes les choses que la technologie facilite et révolutionne dans notre vie quotidienne, je suis en train de poser un débat réfléchi qui mérite d’être porté pour toute chose qu’on prend comme acquis ; à laquelle on est dépendante et qui peut nous passer entre les mains pour nous reléguer à plusieurs années de sous-développement.

Nous, africains, il est grand temps que nous soyons des producteurs au lieu de simples consommateurs. Il est temps que nous devenions des créateurs d’infrastructures, des propriétaires au lieu de simple locataires et de prêteurs.

Il est maintenant urgent, plus que jamais, avec toutes les épreuves que nous avons traversées, que nous commencions d’écrire notre propre constitution en cohérence avec nos principes et nos valeurs.

Oui, l’occident est en révolution digitale. L’Afrique est dans une consommation digitale. Loin de la transformation tant bradée par nos politiques. Loin du développement propre véhiculé par la mondialisation.

Soit nous écrivons notre propre histoire dans les sciences de l’internet et la technologie. Soit nous décidons d’être de simples téléspectateurs chevronnés. Comme l’avons-nous toujours été.

Le choix nous incombe. Et c’est à faire maintenant !!!!

Mieux vaut aller à la défaite en étant libre que vivre au sein d’une sécurité vide de sens à la façon d’un rouage dans une machine.

saac Asimov

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