Seul le travail dur et acharné ne suffit pas !

Juin 2019, j’ai eu l’incroyable chance, au moins c’est ce que je croyais, de travailler en tant que responsable qualité dans une entreprise Chinoise qui évolue dans la construction d’ouvrage d’arts (ponts, auto-ponts, routes, préfabriqués, etc.) et qui avait gagné le marché d’exécution de plus de six projets de ponts et d’auto-ponts dans la capitale sénégalaise.

Ce fût ma deuxième expérience dans le domaine du BTP mais ma première dans un contexte aussi multiculturel et challenger. L’équipe technique et administrative du projet était majoritairement des expatriés chinois. Et l’exécution au sens absolu du terme était effectuée par la main d’œuvre locale et je veux dire par là les travaux pénibles de longue haleine ; L’excavation, le ferraillage, le coffrage, le bétonnage, les manipulations dangereuses de pose, de façonnage, de soulèvement, etc.

Toute ma vie, j’ai toujours cru à la fameuse citation ‘’ Seul le travail paye ’’. Autrement dit, plus vous travaillez dure, plus vous êtes récompensés. Que votre richesse financière dépendra de votre labeur acharné.

Si le travail s’agit uniquement d’être rémunéré à la hauteur de ses efforts, les fameux ouvriers devraient être au sommet de toute récompense possible et imaginaire car presque rien n’équivaut à ce qu’ils apportent. On n’aurait pas de routes sans eux, ni de terrains, de maisons, de stades, de pistes, de produits de consommation………. Et la liste continue !

Si le travail se fonde sur la discipline et la consistance, aucune raison ne peut expliquer qu’un père de famille, qui pendant 30 ans, se réveille avant le lever du soleil et rentre après la couchée du soleil, peine toujours à subvenir à ses besoins les plus élémentaires.

Si le travail constitue à fournir les résultats attendus et de faire A, B, C…… comme le dit la procédure à la lettre, ces fameux ferrailleurs, coffreurs, soudeurs, mécaniciens étaient aussi méticuleux que la main d’un artiste. Comment expliquer qu’ils soient presque au plus bas de l’échelle sur le plan hiérarchique et financier ?  

Pourtant, ils sont aussi qualifiés que les bureaucrates. La seule différence réside sur le fait qu’ils sont des travailleurs manuels alors que les derniers sont des travailleurs de connaissance. N’empêche, ils ont tous les deux une qualification spécifique. Le soudeur a une qualification particulière de même que le technicien du laboratoire.

Malheureusement, l’économie capitaliste en profite pour tirer le maximum de ses ouvriers moyennant des rémunérations minimalistes voire dérisoires.

Je ne pense pas être en mesure d’influencer ce système ou les différents processus économiques. Je ne suis non plus aussi naïf au point de penser qu’il est possible d’avoir un système économique équitable et équilibrée.

Peu importe le système, il y aura toujours un groupe de dominateur et un groupe de minorités marginalisées, délaissées ou complètement devancées. Encore, le problème n’est pas là. C’est quand la minorité devienne la majorité et que 90% des richesses sont détenues par 10% de la population que s’impose une réflexion.

Seul le travail dur et acharné ne suffit pas. La preuve est évidente : les 90% de la population mondiale travaillent fondamentalement pour rendre plus riche les 10%.

Forbes Magazine

Le travail acharné n’est qu’une partie du puzzle pour réussir sa vie. Il est loin d’être le seul conducteur. Comprendre le sens du travail, ses différentes caractéristiques et ses ramifications sont d’une importance capitale pour compléter le reste du puzzle et accueillir de nouvelles perspectives dans la vie.

Le sens du travail proprement dit

Le travail est défini selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT) comme étant toute activité exercée dans des conditions favorables sous les ordres et contrôles d’un employeur moyennant une rémunération.

Cette définition rime bien avec le rictus (seul le travail paye) mais reste trop limité sur le long terme et sur la relation qui existe entre le travail et la vie de manière générale.

Au-delà de cette définition,  le travail est l’une des bases fondamentales de la société car il donne à l’individu à la fois une significativité, une orientation et un sentiment de cohérence qui sont les trois sens du travail proprement dit.

  • Signification :

C’est la perception ou l’idée que l’individu a par rapport à son travail. Il peut représenter chez certains une identité sociale qui permet de trouver sa classe dans la société et d’être considéré ou respecté. Il peut représenter chez d’autres un sentiment d’appartenance ou d’utilité, etc.

  • Orientation :

C’est l’intention ou la finalité escomptée par l’individu vis-à-vis de son travail. Est-ce l’intention recherchée est d’être payée à la fin du mois indépendamment de la qualité du service rendu et quel que soit la répercussion de son travail sur les autres ou d’être utile à une cause et de participer à la réalisation d’une chose pour l’intérêt commun ou pour être autonome et libre de faire tout ce que vous voulez ou pour avoir la chance de se développer et d’apprendre.

Le travail doit s’orienter vers l’objectif que vous vous fixez dans la vie. Si vous voulez accumuler des richesses, accumuler des expériences, nouer des relations et des partenariats, le travail peut être une orientation légitime pour vous.

En revanche, si voulez être un flemmard qui ne veut rien faire à part jouer des jeux vidéos ou parler de l’actualité, je ne pense pas que le travail peut être une bonne finalité qui vous aide à atteindre cet objectif.

  • Cohérence :

Le dernier sens que le travail doit avoir c’est la cohérence : la pertinence entre le travail que l’individu exerce et ses principes & valeurs. Est-ce le travail reflète vos convictions en tant qu’individu. Est-ce qu’il est en parfaite adéquation avec les messages que vous véhiculez ou est-il juste un outil de s’enrichir et un pouvoir d’influence sur les autres.

Un volontaire d’une organisation humanitaire trouvera une certaine pertinence dans sa volonté de devenir politicien pour une simple raison qu’il existe un lien entre le volontariat et la politique : le service public.

Un fervent défendeur de l’équité et de la justice pourra décider facilement de devenir gendarme où un avocat. En revanche, il aura du mal à trouver sa cohérence parmi un groupe de corrompus.

Ces trois sens du travail sont visibles dans chaque catégorie de travail. Si on prend l’exemple de nos fameux ouvriers de construction, on peut disséquer les trois sens : le sentiment de nécessité et la pression sociale édictent la perception qu’ils ont de leur travail. Être payé à la fin du mois pour qu’il puisse se nourrir et prendre soin de leur famille est leur orientation principale. La dignité, le moral, le respect, l’acharnement, l’effort, la détermination, la consistance, l’engagement aveugle, seul le travail paye et parmi tant d’autres constituent les principes et valeurs qui donnent de la cohérence et de la pertinence à leur vie.

Cependant, comprendre uniquement le sens du travail est limitrophe et ne suffit pas pour atteindre vos objectifs et votre vrai potentiel et surtout pour accumuler des richesses. Par conséquent, il est tout à fait important de comprendre en plus du sens du travail, ses différentes caractéristiques :

  • Caractéristique 1 : Utilité sociale

Comme dit dans les paragraphes précédents, le travail procure un sentiment de considération, de significativité, d’appartenance et de légitimité sociale à l’individu.

  • Caractéristique 2 : Rectitude morale de travail

Le travail est un principe de moralité qui confère à l’individu le sentiment de raison, de responsabilité et de bienfaisance par rapport aux dimensions socio-économiques qui appellent qu’il y ait une corrélation de mérite et de moral entre ce qu’on gagne et ce qu’on fait.

  • Caractéristique 3 : Occasion d’apprentissage & de développement

Le travail ne doit pas se limiter à exécuter une activité routinière et d’être rémunéré à la fin du mois. Si nous passons plus de temps dans nos espaces professionnels que dans nos espaces personnels, il est tout à fait normal que nous voudrions pendant que nous y sommes d’atteindre la meilleure version de nous-mêmes, de se développer personnellement et professionnellement et d’acquérir de nouvelles compétences qui nous seraient utiles. L’argent s’épuise, la connaissance reste.

Le travail doit être un moyen d’amélioration, d’épanouissement et d’accomplissement de soi.

  • Caractéristique 4 : Autonomie

Bien que le travail sous-entende un échange de temps de service contre une rémunération, il englobe aussi la notion d’autonomie. La liberté de s’exprimer, de choisir son propre domaine et ses centres d’expertise, de négocier sa propre valeur, de changer de métier ou de poste entre autres sont des éléments d’autonomie et de dépendance de soi qui font partie intégrante des caractéristiques du travail.

  • Caractéristique 5 : Qualité des relations

Une étude de l’Institut Harvard mené a démontré que les personnes qui nouent des relations saines et transparentes avec leurs familles, leurs collègues, amis ont tendance à avoir une espérance de vie très élevée.

Un travail stressant ou un environnement toxique conduit souvent à des dépressions et des maladies psychiques chroniques. Le travail doit être un liant social et un facteur de cohésion entre les différentes parties qui partagent les mêmes centres d’intérêt aboutissant ainsi à une bonne qualité relationnelle et par conséquent une bonne qualité de vie.

En résumé, c’est seulement à l’intersection des trois sens du travail avec ses différentes caractéristiques que naisse un travail sensé proprement dit qui va au-delà de la définition de l’Organisation Internationale du Travail.

Je suppose que le rictus ‘’ Seul le travail paye’’ renvoi à cette version complète du travail et non celle qui fait allusion à la profession et qui renvoi à l’échange de service contre une rémunération.

Heureusement, tout n’est pas une question de travail dans la vie. On Peut avoir une passion extraprofessionnelle qui peut ne pas avoir aucune relation avec notre profession. De même que ce que vous pensez être votre mission peut ne pas avoir aucune relation avec votre vocation.

Afin de cerner les différentes ramifications qui existent autour du sens du travail, le terme ‘’IKIGAI’’ est un terme japonais qui signifie de manière générale la raison d’être de l’individu. C’est une matrice qui, à travers ses 04 piliers, permet à chaque individu de déceler :

  • Ce qu’il aime ;
  • Ce en quoi il est doué ;
  • Ce pourquoi il est payé ;
  • Ce dont le monde attend de lui.
Schéma IKIGAI

Ces quatre piliers sont :

  • La profession ;
  • La passion ;
  • La vocation ;
  • La mission.

Le sens du travail qu’on a défini en haut rejoigne de plus près, selon le concept IKIGAI, à la notion de profession qui sous-entend échange de service contre une rémunération. Etant donné qu’une profession est dépendamment liée à la notion de compétence (Savoir et savoir-faire), il devient logique de l’annexer à ce qu’on appelle une mission qui renvoi à la raison de votre être dans l’entreprise, domaine ou groupe dans lequel vous réalisez cette profession.

Profession + Mission = Ce pour quoi vous êtes payés.

Et ce n’est pas compliqué de trouver les raisons pour lesquelles un organisme ou une personne paye une personne ou une entreprise. Les contrats, les fiches de postes ainsi que les cahiers de charges spécifient de manière détaillée ce qui est attendu en termes de services ou de produits.

En réalité, cette équation de la matrice IKIGAI ne comporte pas de facteur stimulant qui peut pousser l’individu à vouloir se donner davantage, de faire plus, de vouloir développer ses aptitudes professionnelles, d’être soif de nouveaux défis.

Souvent les personnes qui sont payées pour faire une activité spécifique sont des conformistes. Elles se limitent aux tâches routinières et s’arrêtent au millimètre près à ce qui leur est demandé. Même s’elles sont convaincues qu’il existe une autre manière plus efficace et efficiente de faire ce qui est demandé ; elles préfèrent suivre à la lettre les consignes et évitent autant que possible toutes variations éventuelles.

La propension à la perfection, à vouloir faire mieux, à prendre des risques, à gérer les variables, à résoudre des problèmes durant le processus d’exécution nécessite une certaine dose de PASSION.

On ne peut pas être doué sur quoi que ce soit si on n’est pas passionné de ce que nous faisons. Ce qui nous amène à la deuxième formule de la matrice IKIGAI :

Passion + Profession = Ce en quoi je suis doué.

Si vous prenez ce en quoi vous êtes passionnés et vous en faites une profession ou si votre profession coïncide par hasard avec votre passion, vous serez d’accord avec moi que le salaire est loin d’être votre première préoccupation.

Votre propension de vouloir devenir meilleur et votre hargne de contribuer à la réussite du collectif vous pousse au plus grand des égards à défier tous les défis, trouver des réponses et à s’assurer que le travail soit bien fait et dans les règles de l’art.

La manifestation de cette formule est fulgurante dans le monde des sports. Ce que tous les sportifs partagent en commun c’est leur passion inébranlable au sport. Ils sont, à travers les entraînements et les exercices, à la recherche et au maintien des moyens de devenir meilleurs et d’affûter leur talent.

Ça va au-delà d’être juste payé. Presque tous les sportifs continueraient d’évoluer aux alentours de leur passion après leur retraite car la passion ne peut jamais être entièrement récompensée.

C’est le même constat avec les entrepreneurs qui décident d’exploiter leurs idées quitte à créer des business. Qui déciderait-il de commercer au plus bas et de construire pas à pas en sachant que tout peut s’écrouler du jour au lendemain ? Seulement les vrais passionnés !

Par conséquent, la passion rime toujours avec l’amour. Quand on est passionné de quelque chose c’est parce qu’on l’aime profondément. Ainsi, on se retrouve à la notion de vocation qui signifie : Inclinaison, penchant particulier pour un type d’activité.

Passion + Vocation = Ce que j’aime

La troisième formule de la matrice IKIGAI explique la nature intrinsèque de certaines propensions qui sont indépendamment de notre contrôle. Si vous êtes nés dans une région connue pour ses champs fertiles, ce ne serait pas surprenant si vous avez un penchant particulier pour l’agriculture. Il est en quelque sorte moulé dans votre DNA. L’agriculture devient psychique et partie intégrante de vos références socio-économiques.

Les sociologues suivent un principe très connu qui stipule que l’environnement ou le contexte est plus important que la personnalité. De facto, le premier façonne toujours le deuxième et non l’inverse.

Ce principe résume cette formule dans son ensemble. C’est ce qui explique que le fils d’un joueur de basket devienne à son tour un joueur du fait que son environnement de naissance a créé cette vocation au sport.

La réalité est que ce que vous aimez peut-être différent de ce dont le monde a réellement besoin. Et la question alors est : qui détermine ce dont le monde a vraiment besoin ? C’est vous !

Et la réponse à cette question constitue ce qu’on appelle la MISSION.

Elle résume le terme IKIGAI au sens absolu du fait qu’elle représente la raison d’être de l’individu sur ce monde. C’est le pourquoi ultime de la personne. C’est la raison et le motif qui se cachent derrière chaque décision prise.

Prendre votre penchant particulier qui est considéré comme votre vocation et le considérer comme votre raison d’être et votre guide pour servir l’humanité et l’univers ; c’est cela que le monde a besoin d’où l’importance de la dernière formule de la matrice IKIGAI qui en quelque sorte résume tout.

Mission + Vocation = Ce dont le monde a besoin

Par instance, Albert Einstein était connu depuis le bas âge pour ses aptitudes intellectuelles hors normes. Il avait toujours le score le plus élevé dans les différents tests QI (Quotient intellectuel).

L’explication biologique semble être l’explication la mieux adaptée. Il avait naturellement et avec une simple aise cette possibilité de résoudre les équations sophistiquées et les problèmes compliqués. Il était ainsi créé.

Cette aptitude l’a poussé à se pencher de plus en plus dans le monde de la science. Etant un domaine jugé compliqué et sophistiqué par le public. Il y trouvait facilement ses repères et se sentait dans son domaine de prédilection. Elle est devenue son inclinaison et sa propension naturelle. Autrement dit, sa vocation.

Avec l’évolution du temps et le développement de ses compétences scientifiques, il a fini par trouver des moyens d’expérimenter ses idées qui se sont révélées potentiellement intéressantes et disruptives capables d’expliquer les phénomènes inconnus de l’univers.

Cette quête de la vérité fondée sur la science est soudainement devenue sa raison d’être, sa mission principale sur terre. Par conséquent, cette vocation et cette mission sont les précurseurs des théories scientifiques les plus éprouvées de notre époque et les dérivés de beaucoup d’inventions.

Son parcours révèle dans son comble pourquoi l’équation de la vocation ajoutée à la mission donne comme résultat ce dont le monde a besoin. Et je dirai que tout travail qui se veut éternel, transcendant et révolutionnaire se doit de suivre cette formule.

L’exemple d’Einstein en est juste un. C’est le parcours de tous ceux qui ont eu à révolutionner le monde, à contribuer au bien-être de l’humanité de manière générale.

La question qui se pose maintenant que vous savez les caractéristiques du travail et les différentes formules et ramifications qu’il peut avoir, quel genre de travail aimeriez-vous avoir ?

Est-ce serait une profession, une passion, une vocation ou une mission ? La réponse dépend entièrement de vous. Elle n’a pas besoin d’être statique. La vie est dynamique. Ainsi, notre orientation par rapport à ses termes. L’essentiel c’est d’être en quête continue d’amélioration et cela doit être en quelque sorte la mission de tout un chacun.

Comprendre tous ses termes et leurs ramifications est une importance capitale pour guider votre bateau dans l’immense étendue de l’univers.

Peut-être si ces fameux ouvriers avaient compris la matrice d’IKIGAI et s’engageaient dans une quête d’efficacité et d’efficience et non de conformité et de stagnation, peut-être ils auraient pu maximiser leurs revenus, exploiter leur passion, travailler sur leur vocation et surtout trouver leur vraie mission. Peut-être ils auraient pu rêver grand, atteindre la meilleure version d’eux-mêmes.

Au moins, avec ce qu’on vient de découvrir, ils auraient pu construire un fondement solide pour bien mener leur quête personnelle.

La compréhension du sens du travail, de ses caractéristiques et la matrice IKIGAI constitue un soubassement fort pour bâtir et d’élever des étages de réussite à la fois personnel et professionnel.

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